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Une frenchie à la découverte de l'autre bout du monde, partie voir là-bas si j'y étais.

mardi 9 avril 2013

Quelques jours à Crystal Waters


Les photos sont par ici.

De Crystal Waters, on m’avait beaucoup parlé. Communauté existant depuis près de 35 ans, centrée autour de la permaculture et d’une vie harmonieuse avec la faune sauvage, le tableau était pour le moins alléchant. Mais comme je devais vite m’en rendre compte, y wwoofer n’est pas si facile. Sur la dizaine d’hôtes qui habitent l’endroit, ceux qui m’intéressaient le plus n’étaient soit pas disponibles, soit proposaient des conditions ou des projets qui ne m’intéressaient pas vraiment. Mais un échange de mails soutenus et chaleureux avec Max Lindegger, fondateur de l’endroit, me donne l’occasion de m’y rendre pour quelques heures.  Pendant que nous plantons des laitues en compagnie de Dessa, une volontaire brésilienne, Max m’expliquera un peu l’histoire de la communauté et certaines de ses techniques de jardinage, sans aucun secret. Je suis, encore une fois, un peu déçue de la façon dont est organisée sa propriété, considérant le fait qu’il pratique et enseigne la permaculture depuis près de 30 ans. Mais il souligne justement qu’il n’est plus si extrémiste qu’il a pu l’être. Si la conversation est intéressante, je ne suis pas sure qu’il y ait quelque chose ici pour moi. D’autant que les membres n’ont aucun droit de regard sur les nouveaux acheteurs du village et que se multiplient les résidences secondaires et habitants n’ayant pas d’intérêt pour la permaculture, au détriment du jardin communautaire, qui dépérit. 

Mais alors que nous revenons le lendemain pour voir le marché, fameux dans la région, en compagnie de Brett et de Jessica, volontaire américaine à Bellbunya, je découvre sur le panneau des petites annonces une demande d’aide pour trois jours, dans une propriété en permaculture. Or il me reste exactement une semaine à passer à Bellbunya avant de filer vers le Sud, Brisbane, puis mon prochain spot de wwoofing. Le weekend sera émaillé de tentatives de contacter l’hôte, Kaelana, qui, comme je le découvre en en discutant avec Joan, a vécu un temps à Bellbunya et sera donc surement encline à m’accueillir. Et en effet, lorsque je parviens enfin à la joindre, sa réponse est positive! Je débarque donc le mercredi suivant, quittant Bellbunya en prenant le chemin des écoliers pour profiter de l’incroyable vue qu’offre le trajet.

Comme je ne vais pas tarder à le découvrir, Kaelana est complètement perchée. Pratiquant le tapping, ou EFT (Emotionnal Freedom Technique, une technique de psychothérapie alternative), elle est aussi fondue de méditation, de soins par les cristaux et de tout un tas de pratiques new age qui sont clairement trop pour moi. Elle parle notamment à sa nourriture et aux graines qu’elle met à germer, leur disant qu’elle les aime et les remerciant, et m’assurant avec aplomb qu’elle a remarqué que la germination était plus effective ainsi. Heu, ok, très bien. Et le fait d’écrire « I love you – Thank you » sur les carafes filtrantes ça aide à purifier l’eau alors ? Mon scepticisme est à son maximum mais j’essaie de ne pas laisser le cynisme qui l’accompagne devenir trop flagrant car après tout, je ne suis là que pour quelques jours, et je suis à Crystal Waters !

Ensemble nous allons désherber une partie de son jardin, ce qui me permettra d’apprendre le nom de certaines herbes utiles en médecine ou comme comestibles (et que si on remercie les mauvaises herbes au moment de les arracher, elles viennent plus facilement, sisi). Nous allons aussi créer un passage en utilisant des cartons de récupération pour étouffer les mauvaises herbes, fertiliser les arbres fruitiers au compost, planter des aromatiques et collecter les inflorescences de certaines mauvaises herbes pour empêcher leur propagation et faire un thé de plantes qu’elle utilisera comme fertilisant. Je découvre aussi, en pratique, l’usage des cochons d’inde comme tondeuse à gazon, dans une cage ouverte au sol qu’on déplace régulièrement pour leur faire maintenir un espace. Un travail qui me semble long et fastidieux.

J’y nourrirais aussi des perroquets, venus picorer dans ma main des graines de tournesol, et ferais des miracles de cuisine, réinventant perpétuellement le contenu d’un frigo d’un vide quasi abyssal, parvenant même à créer un gâteau cru carottes râpées, miel et noix mixées que nous disposerons joliment au centre d’une assiette tournesol avant de le partager pour l’anniversaire de son fils, qui vit à des centaines de kilomètres de là. Pendant ce temps elle médite, fait des sessions skype de tapping qui ressemble beaucoup pour moi à des discussions matinées de psychologie hippie où on s’auto-convainc et convainc l’autre en parlant de lâcher prise, de choisir la joie, l’amour, la compassion etc. Et moi ? Moi je me ballade, je visite le village, qui n’a de village que le nom car excepté la boulangerie, ouverte deux jours par semaine, et les salles communes à l’entrée, le reste n’est que maison. Pas de commerces, pas d’entreprises, si ce n’est le jour de marché. En passant le jeudi chez Max acheter quelques-unes de ses merveilleuses bougies 100% naturelles qui embaument la cire d’abeille, je découvre qu’une conférence à lieu le soir même dans une ville voisine sur la capacité des petites fermes à survivre, et que certains membres de Crystal Waters, dont Dessa, seront présents. Pas d’hésitation possible, je décide de m’y rendre, sans Kaelana qui me dit avoir dépassé ce stade. C’est donc seule que je rejoins Maleny, un adorable village niché au creux d’une colline, et retrouve, dans un de ses cafés branchés, Dessa, donc, et trois autres membres de la communauté, dont une sublime jeune femme que j’avais aperçu le jour du marché et que je n’avais pas osé approcher.

Si la conférence n’est pas inintéressante, je garde un souvenir plus ému de la nourriture que je commande (un incroyable pesto betterave/feta notamment) et des échanges avec les personnes à ma table. Melting pot culturel, notre groupe compte donc Stéphane, français ayant travaillé dans l’hôtellerie de luxe et reconverti depuis 9 ans en producteur de fromage, collecteur de graines et vendeurs de jeunes arbres, plus homme à tout faire (« j’ai une tronçonneuse ») ; Dessa, brésilienne venue tout exprès en Australie faire son stage d’études environnementales sur la permaculture ; Roumi, espagnole arrivée presque par hasard il y a un peu plus d’un an et travaillant depuis comme volontaire avec Robin Clayfield, papesse new age de la permaculture, que je louperais car elle prépare en ce moment une retraite de 3 jours sur le fait d’être femme ; et un jeune américain timide qui travaille aussi avec Robin et qui restera en retrait toute la soirée. Et moi, française voyageuse sur les traces d’un mode de vie plus durable et qui trouve ses réponses dans les communautés et la permaculture.

Je quitterais Crystal Waters le lendemain après-midi, mettant à profit l’invitation d’Iris, ma collègue de Kin Kin, à venir passer la soirée chez elle sur ma route vers Brisbane. Mais avant, je fais un crochet par la maison de Stéphane, qui m’a proposé de passer papoter un peu en français et goûter ses fromages. Stéphane n’est pas là, mais je commence à taper la discute avec un gars du bâtiment construisant un studio tout à côté. Chaleureux et blagueur, il me demande si je peux lui filer un coup de main parce qu’il est à la bourre pour finir ce projet et, n’ayant rien de mieux à faire dans l’immédiat et ne pouvant pas arriver trop tôt chez Iris, je suis mon instinct et accepte. En moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire, je me retrouve en train de visser des lattes de parquet, puis de peindre le sol au rouleau, payée en chocolat et en musique, ainsi que par la promesse que, s’il descend sur la gold coast, il me contactera pour me donner une leçon de surf.

Et me revoilà sur la route, petit sourire aux lèvres, pour aller rejoindre Iris à Buddina, banlieue moche de la gold coast, mais où un lit confortable et un délicieux dîner m’attendent. Un dîner avec de la viande! Chose qui est devenue extrêmement rare dans mon quotidien ces derniers mois, ce qui n'est pas pour me déplaire.

Au matin, après que j’ai déversé sur son nouveau disque dur la somme des ressources en permaculture que j’ai collectées auprès de mes différents précédents hôtes, iris me fait les honneurs de son jardin, déjà très productif, et de ses projets, avant de m’emmener au pas de charge faire le tour du marché voisin où je succombe à un incroyable gâteau poire amande sans gluten qui ne sera pas de trop pour ce soir, car je suis invitée à un anniversaire par mon hôte de couchsurfing !

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